Juin 2012

 

Le réveil danse sur la caisse en bambou. J’ouvre un œil tout en sachant que je n’y verrai pas plus clair. Il est quatre heures du matin et mon avion décolle de Port au Prince dans deux heures. Mon paquetage est prêt, mais je voudrais passer à la clinique, dire au revoir à Lily Rose avant de lever le camp. Elle est jeune, elle est belle, Lily. Une peau douce comme un marron glacé, un sourire à ­­­faire fondre un fish stick au pôle sud. Et des yeux noirs immenses, aussi profonds que son désespoir.

L’humidité est déjà bien présente. Ma paillasse sent le moisi et mon t-shirt me colle à la peau comme une sangsue en plein festin. Avant de fermer la case qui me sert de dortoir, je vérifie que le billet d’avion, dans ma poche, est bien au nom de Nicolas Lambert. J’étais tellement fatigué, hier, quand je l’ai ramassé sur la table que je n’ai pas vérifié si c’était bien le mien. On est trois médecins belges, deux anglais et quatre français à rentrer aujourd’hui. C’est la plus grosse organisation MSF depuis sa création. Un déploiement considérable d’hommes et de matériel qui atténue à peine la détresse de ce peuple. On se sent impuissant devant l’ampleur de la catastrophe, désarmé devant le fossé qui sépare ces gens d’une vie digne, si loin de leur quotidien réduit à l’état de souffrance et d’attente.

C’est mon premier séjour en Haïti. Deux ans après le tremblement de terre, le pays est encore à l’état de ruines. Deux cent trente mille morts en quelques jours. Plus de cinq cent mille personnes sont toujours déplacées dans des abris de fortune ou regroupées sous des arbres ou des palmes séchées. Dans ce quartier, il n’y a pratiquement pas d’installations sanitaires, pas d’eau courante, les égouts sont à ciel ouvert, la puanteur est étouffante. Un relent d’excréments et de charogne plane en permanence au dessus des campements.

La magie noire et les rites vaudou tiennent lieu de remède et des enfants meurent tous les jours dans la rue, de faim et de dysenterie. L’exorcisme pratiqué à même le trottoir est l’antibiotique des plus démunis. Une gifle en pleine figure pour un toubib.

La misère est partout et si le traumatisme des premiers mois s’est un peu atténué, le choléra a remplacé les blessures dans les consultations du dispensaire. La plupart des patients que j’ai soignés sont des miraculés que les sauveteurs ont retirés des décombres. Ils ont déjà été opérés plusieurs fois par des confrères et je ne serai pas le dernier neurochirurgien à m’occuper d’eux. Leur calvaire n’est pas terminé. Le mien s’arrête ici. J’ai tenu ma promesse. Celle que j’ai faite seul, au pied d’une tombe. Les canons s’étaient tus sur mon serment, les drapeaux s’étaient fanés sur leur mât. J’écoutais le silence se charger de souvenirs. Pour moi aussi, la vie allait changer.

 

11 décembre 2011, six mois plus tôt

 

La sonnerie du téléphone grelotte dans mon sommeil. Je suis mort crevé. J’ai opéré jusqu’au lever du jour. L’infirmière de réanimation m’informe que le patient de cette nuit s’enfonce et que je ferais bien de rappliquer dare-dare pour rencontrer la famille.
Je m’effondre en jurant, le visage enfoui dans l’oreiller. Marre de ce putain de métier! La nuit a été trop courte, envahie de cauchemars épouvantables. J’étais plongé en plein champ de bataille. Des explosions, des hommes à moitié déchiquetés qui hurlaient. Une sueur aigre trempe la blouse de mon pyjama. Une odeur de peur.

Je me laisse tomber du lit pour être certain de ne pas me rendormir. Je renifle la moquette beige qui n’a pas encore eu le temps de prendre l’odeur des pieds. Tout ici est flambant neuf, design, haut de gamme. Villa contemporaine sur les hauteurs d’Embourg. Cadre idyllique pour solitaire endurci. Le banquier me l’a confiée pour vingt ans en se prenant au passage plus d’un tiers de mon salaire. Tout ce luxe me rappelle que la quarantaine s’est installée. Une gueule encore acceptable si on aime les cernes sombres sous les yeux clairs. Des fils de plomb se sont infiltrés dans mes cheveux bruns, creusant dans leur sillage, un court-circuit digne d’une ligne à haute tension. Je ne l’ai pas vu venir…

L’eau  de la douche m’ébouillante, je me sens lentement redevenir vivant. J’enfile une chemise Ralph Lauren sous un pull en cachemire. Repos dominical pour la cravate. Mon jeans flotte sur mes hanches, je vais devoir changer de ceinture. Un vrai chat de gouttière. Trop maigre, les traits tirés. Je devrais bosser un peu moins, sortir, boire, baiser un peu moins. Tout un peu moins. Mais c’est ma façon de tenir debout depuis toutes ces années. Depuis…

 

Le ronron de ma TT Quattro me fait toujours le même effet. Je le trouve rassurant. Deux cent cinquante chevaux et une accélération de zéro à cent en moins de sept secondes. Une sensation de puissance comme un excès de testostérone dans les veines. Vivre vite. Dans l’urgence. Comme si tout allait s’arrêter demain. Ma bagnole est mon miroir. Une carcasse robuste et fiable abritant  un intérieur en cuir fauve délicat. Une ligne de déesse me rappelant mes désirs toujours inassouvis. Une vestale élégante, toute en courbes et en rondeurs. Je la bichonne comme d’autres caressent leur femme. Une passion moins envahissante qu’une maîtresse attitrée.

 

Il règne un froid polaire dans le hall de la clinique. Aux soins intensifs, la famille de mon opéré d’hier poireaute en larmes dans la salle d’attente. Même après toutes ces années, j’ai toujours un pincement au cœur quand je croise leur chagrin. Dans mon service, l’humainement possible ne suffit pas. C’est souvent la mort qui gagne.

Je bipe le réanimateur de garde. C’est Céline qui arrive. On s’est connu en première année de Fac, dans les auditoires du Sart Tilman. Une amitié qui s’est intensifiée au fil des ans et qui, malgré les épreuves, ne s’est pas démentie.

–         Salut Nico, ça va ? T’as une sale tête…

–         La nuit a été courte.

–         S’il n’y avait que ça…

–         Laisse tomber, tu veux.

–         Tu vois quelqu’un en ce moment ?

–         Pas vraiment.

–         Tu devrais. T’es plus un perdreau de l’année. Il serait temps que tu t’cases.

–         On en a déjà parlé cent fois.

–         Apparemment, ça n’a pas suffi !

–         Sois sympa, Céline, cherche-toi quelqu’un d’autre à materner. Comment va mon patient ?

–         Mal, mais tu n’as pas besoin de moi pour le savoir. Le compte rendu des dernières heures est dans le dossier.

Elle me claque le classeur dans les mains et me plante là. J’ai l’habitude. Ça fait plusieurs années que nos discussions tournent court. Même si je sais qu’elle a raison, ça m’emmerde qu’elle me le rappelle sans arrêt.

 

 

Juin 1995, 17 ans plus tôt

 

L’aube pointe le bout de son museau et trouve Marie attablée devant ses cours. Elle titube jusqu’à son lit. Dormir quelques heures avant de présenter le dernier examen de la session. Dans deux ans, à la fin de son doctorat, elle présentera le concours de spécialisation en pédiatrie.

Depuis quelques temps, elle bosse tous les soirs pour un labo pharmaceutique. Elle travaille sur les essais cliniques d’un nouveau médicament. Elle est épuisée et elle s’inquiète car les résultats qu’elle doit valider lui paraissent confus. Elle en a parlé à son chef de service mais il ne semble pas lui prêter beaucoup d’attention. De plus, le dossier qu’elle a constitué sur le sujet a été transmis à un de ses collègues et son directeur de recherche l’a transférée sur un autre projet jusqu’à la fin de l’été. Furieuse, elle ne s’est pas gênée pour faire savoir son mécontentement. Sans résultat.

 

Deux semaines plus tard, un article paraissait à la Une du journal La Meuse. « Une étudiante en médecine renversée par un chauffard ». En traversant le boulevard d’Avroy, ce samedi vers vingt-deux heures, une jeune interne de vingt-trois ans, Marie Bronchard, a été percutée par une voiture roulant à vive allure. Transportée à l’hôpital de la Citadelle, elle est toujours dans un état critique. 

La police n’a aucune piste. Pas d’indice, pas de témoin.

Marie repose sous un amas de tuyaux. Sa cage thoracique se soulève à un rythme régulier. Une machine insuffle de l’air dans ses poumons pour la maintenir en vie. Son combat est perdu d’avance. Trois sur l’échelle de « Glasgow », le pronostic vital est engagé. Son amant sanglote à ses côtés.

Ils ont débranché Marie. La respiration s’est arrêtée, le cœur a cessé de battre. Son compagnon n’a pas dessaoulé pendant des jours. Ses amis se sont relayés auprès de lui, le laissant pleurer sans retenue, mais le forçant à se lever et à s’alimenter. Une saison en enfer,  noyée dans l’alcool bon marché. De quoi  procurer l’oubli avant d’entamer un hiver infini.

 

 

13 Décembre 2011

 

A quelques mètres de moi, une déflagration assourdissante me vrille les tympans. L’onde de choc a été terrible. Puissante, dévastatrice. Je ne vois plus que des corps mutilés. Les hommes autour de moi n’ont pas eu le temps de gueuler leur peur et leur douleur. Ils sont figés pour toujours dans des postures grotesques que la mort a dessinées pour eux. Je suis le seul survivant. Je rampe sur le sol sablonneux en essayant de me mettre à l’abri.  La fumée me pique les yeux et me donne la nausée. Les spasmes de mon estomac sont si importants que je me réveille en sursaut, trempé de sueur et de larmes. Je tremble du dégout de ce que je viens de vivre. Parce que je l’ai vécu. Pas seulement rêvé. J’ai ressenti cette explosion au plus profond de mes tripes. J’ai vu des camarades à mes côtés, j’ai reconnu des visages que je serais incapable d’identifier, mais qui me sont pourtant familiers.

Une semaine que ce cauchemar hante toutes mes nuits. A quatre heures cinquante. Tous les matins.

Je m’arrache du lit, soulève le store anthracite et ouvre la fenêtre. Pas une lumière à l’horizon. Les arbres embrumés sommeillent sous la chape hivernale. Le murmure de la nature se fait discret, la vie tourne au ralenti. Je voudrais qu’il en soit de même pour moi. Calmer le rythme, lâcher prise et me débarrasser de ces foutus cauchemars.

 

Vers dix heures, on grattouille à la porte de mon bureau. Un habitué qui sait que j’ai horreur des gens qui tambourinent aux portes comme si leur vie en dépendait. David glisse la tête dans l’embrasure et me demande s’il ne me dérange pas.

–     Qu’est-ce qui t’amène ?

–    Rien de spécial, je venais voir comment tu allais.

–    Un psy ne se dérange pas juste pour tailler une bavette.

–    Tu m’inquiètes, t’as l’air d’un zombie.

–    C’est ta femme qui t’envoie ?

–    Céline n’a rien à voir là-dedans.

Je soupire en fermant les yeux. Ma nuque est douloureuse. La migraine de ce matin ne m’a pas lâché.

–    Je dors mal.

–    Insomnie ?

–    Cauchemars.

–    Je t’écoute…

Et pour la première fois depuis des lustres, j’ouvre les vannes. Je lui décris mes nuits d’angoisse. Les combats aériens, les explosions de missiles, les champs de mines, les rafales d’armes automatiques. Il pose des questions. Drogue, excès de médocs? Par pure forme, il sait que je ne touche pas à ces saloperies. Choc émotionnel, agression, accident de voiture? Rien qui puisse expliquer ce qui lui semble être un syndrome post-traumatique. Mon malaise grandit. Il essaye de me rassurer, mais je sens au plus profond de mes tripes que rien ne pourra me tranquilliser. J’ai le sentiment d’avoir laissé dans ces cauchemars une partie de moi-même.

 

Les sirènes hurlent leur désespoir aux abords de la clinique. Depuis une heure, les grosses camionnettes jaunes, lardées de rouge ou de bleu, entrent et sortent des urgences dans un ballet ininterrompu. A peine le temps de décharger les brancards, qu’elles repartent à l’assaut du centre ville.

Place Saint Lambert, le chaos est indescriptible. La désolation est à son comble. Peu avant douze heures trente, du haut de la plate-forme surplombant « Le point chaud », un tireur isolé a lancé des grenades dans la foule. Des hommes, des femmes, des enfants sont tombés. Beaucoup d’adolescents sortant de l’école. Le marché de Noël est jonché de cadavres et les blessés baignent dans les débris de verre des abribus éclatés. La faible lumière de cette journée ne scintille plus sur les fragments dépolis. Des guirlandes lumineuses sans vie pendouillent entre les chalets de bois. Des décorations multicolores déchiquetées traînent sur le sol mouillé. Des haillons rougis, fouettés par le vent comme des fanions oubliés, témoignent de la violence des explosions. Le tumulte des festivités a fait place à un silence de banquise, percé seulement par le hululement du SAMU et les gémissements des victimes. Les regards vides et les visages hagards reflètent l’étendue des dégâts.

A l’annonce du carnage, mon estomac valse à l’envers et je dégueule. D’horreur. De trouille. Une sueur glacée dégouline dans ma nuque. Fermer les yeux quelques secondes, respirer à fond, faire le vide et reprendre le contrôle. Appeler mes proches pour les savoir à l’abri. Penser à leur dire que je les aime, la prochaine fois que je les verrai. La prochaine fois…

Tout l’hôpital est en état de choc. Ça crie, ça se bouscule. La panique se lit sur tous les visages, mais pas dans les gestes. Ils sont précis, déterminés. Presque déshumanisés. Enchaîner les soins, calmer, rassurer.

Les ambulanciers sont atterrés. Jamais ils n’ont vu pareille hécatombe. Les psys se relayent pour éponger leur détresse. Les sauveteurs ne sont pas préparés à une telle boucherie. Personne ne l’est et personne ne s’en remet tout à fait. Les cicatrices resteront sensibles, aussi bien pour les rescapés que pour les secouristes, les flics et tous ceux qui ont côtoyé la mort dans le tourbillon de cette folie.

Cette tuerie tonne comme une déclaration de guerre contre mon passé. Ne pas y penser. Pas maintenant. Pas encore. Tenir le coup pour sauver ceux qui peuvent l’être. Sans état d’âme. Sans souvenir. Sans avenir. Juste l’instant.

 

Je fais un saut à la cafétéria avant de rentrer. Elle est presque déserte à cette heure tardive. Céline, appuyée contre le mur du fond, grignote un sandwich maladif.

–     Des nouvelles ?

–     Rien, pas de revendication

–     Je vais chercher un café, tu veux quelque chose?

–     Merci, j’ai déjà un coca.

Je reviens en soufflant sur ma tasse.

–    Nico, tu fais quoi demain soir?

–     Probablement un tour en ville.

–     Viens plutôt manger à la maison. Toute la bande sera là.

–     Les dîners en couple, c’est pas mon truc. Tu devrais le savoir!

–     Merde Nico!  Ça fait quoi, quinze ans ?

–     Seize. Et six mois.

–     Qu’est-ce que tu aurais pu faire ?

–     J’ l’ai pas écoutée quand elle m’a dit qu’il y avait un problème au labo.

–     C’était un accident. Rien d’autre !

–    C’est ce qu’on a essayé de nous faire croire.

–    Arrête ! Personne n’a rien trouvé. Ni la police, ni toi, ni le privé que t’as mis sur le coup.

–    …

–    Tu vas continuer à te foutre en l’air combien de temps? Tu crois qu’elle aurait voulu que tu boives comme un trou et que tu te tapes toutes les grognasses du Carré pour faire semblant que t’as repris goût à la vie ?

–    Y a que dans le corps des femmes que j’me sens vivant.

–    Combien de temps ? Dix minutes ? Une demi-heure avant de te rendre compte que ce n’est pas Marie ? Que ce ne sera plus jamais Marie !

Je termine mon café, écrase le gobelet en carton et le balance au passage dans la poubelle. Elle a réussi à plomber encore un peu plus ma journée.

 

Le sommeil me fuit comme un joint de robinet qui n’a pas été remplacé depuis Mai 68. Pour une fois, je cède au chant des somnifères et sombre comme une pierre en eaux profondes. Toujours le même cauchemar. Bordel! Quand cela va-t-il s’arrêter ? Rien à voir avec la tuerie du centre-ville. Je suis soldat, il fait chaud, très chaud, je suis dans le désert… Pitié. Non. Pas ça…

Deux jours de galère. Deux nuits de terreur.  Semblables. Ereintants.

Hier soir, je me suis noyé dans la foule du Carré autant que dans le cul des bouteilles. Encore un peu comateux, je relève mon courrier. La tasse de café que je m’apprête à porter à mes lèvres tressaute dans ma main. Mon cœur manque un battement. Ma gorge s’assèche brutalement.

Une lettre en provenance du Ministère de la Défense.

Je caresse l’enveloppe. Mes doigts, si maitrisés d’habitude, tremblent pour la première fois. Une boule d’angoisse me ronge la gorge. Des larmes troublent ma vue. Je n’ose pas l’ouvrir.

Je me souviens de ce que David m’a dit : syndrome post-traumatique. Mais pour qui ?

En quelques secondes, je vois défiler mon enfance dans la petite maison ouvrière de Seraing. Les deux enfants Lambert. Une tête brune, une tête blonde. Inséparables. Le grand brun est costaud et fonceur. La tête blonde est frêle, rêveuse. Dans la cour de récré,  les autres enfants se moquent d’eux et les appellent Nicolas et Pimprenelle. Ils grandissent. Aussi différents qu’on peut l’être, mais avec ce petit quelque chose de particulier qui lie les jumeaux à jamais. Deux moitiés indissociables.

En première candi, Nicolas rêve d’une brillante carrière de neurochirurgien et d’une villa somptueuse sur les hauteurs de Liège. Bastien se voit déjà urgentiste pour Médecins Sans Frontières, une tente plantée dans un camp de réfugiés. L’un réussit,  l’autre pas. C’est l’échec et l’armée comme échappatoire.

Je déchire l’enveloppe et déplie la lettre.

… nous sommes au regret de …  le Lieutenant Bastien Lambert, … quatre heures cinquante … Kunduz,… tombé au champ d’honneur…

Avant de partir en Afghanistan, Bastien m’avait dit, « au moins, en rentrant de là, plus personne ne m’appellera Pimprenelle. »

 

Dans le cimetière militaire, les oreilles encore bourdonnantes des salves des canons, je me suis fait la promesse de réaliser le rêve de Bastien. Devenir médecin pour MSF.

 

 

Juin 2012

 

Mes Caterpillar plantées dans la boue devant l’aéroport de Port au Prince, je savoure le jour qui se lève. L’air matinal est déjà lourd, chargé de pluie et de terre. Désormais, tous mes matins auront le goût de celui-ci. Une saveur d’absence teintée de sérénité.

Ma dernière visite avant de quitter le camp était pour Lily Rose. Une orpheline de 10 ans. Une promesse d’avenir à reconstruire. Elle m’a choisi comme famille, m’a demandé de rester.

Ma vie est ici, maintenant. Je ne rentre en Belgique que pour 6 mois. Le temps de terminer ma formation en neurochirurgie pédiatrique. Pour Marie. Et pour Lily.

Janvier 2013

                                                                                                                                                                                           En mémoire des victimes de la place St Lambert à Liège